Je voudrais crever.
Je voudrais crever Sans avoir connu Les blouses blanches de l'hôpital Qui t'endorment sans tes rêves Les malades culs-nus Avaleurs de pilules Les fils couleur argent Et leurs gouttes-à-bulles Je voudrais crever Sans savoir si la thune Qui nous promet la lune |
Que je sais que j'oublierai Le fond vert de la mer Où valsent les brins d'algues Sur le sable ondulé L'herbe grillée de juin La terre qui craquelle L'odeur des conifères Le pas à pas des chats Et leur regard fixxes Et les baisers de celle |
Je voudrais mourir Sans qu'on ait utilisé La vie artificielle Les heures à végéter La fin avant le début Ou le début sans la fin Et aussi la douleur sans fin Les journaux en 3D Les enfants clonés Et tant de trucs encore Qui dorment dans les crânes |
A un côté tordu Si le soleil va devenir froid Si les 4 saisons Vont rester toutes les 4
Sans avoir à essayer De porter une blouse blanche Dans les couloirs d'un hospice Sans avoir à regarder Le dégoût d'un regard Sans avoir à mettre mon zob Dans des cuvettes bizarres
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Des géniaux inventeurs Des jardiniers joviaux Des soucieux souverains Des urbains urbanistes Et des pensifs penseurs Tant de choses à ne pas voir Ne pas voir et ne pas entendre A chercher dans le noir
Et moi je vois la fin Qui grouille et qui s'amène
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Je voudrais finir Sans connaître la lèpre Ou les 7 maladies Qu'on attrape ici Le bon ni le mauvais Ne me feront de peine Puisque,puisque je ne saurai Ressentir votre peine Et il y a z aussi Tout ce que je connais Tout ce que j'aimais |
Que ceci que cela La belle que voilà Mon d'Ourson, Ma n'amour Je voudrais crever Après avoir usé Sa bouche sur ma bouche Son corps avec mes mains Le reste avec mes yeux J'en dis pas plus faut bien Rester révérencieux |
Avec sa gueule moche Et qui m'ouvre ses bras De grenouille bancroche Je voudrais crever Oui monsieur, oui madame Avant d'avoir perdu Le goût qui me tourmente Le goût qu'est le plus fort Je voudrais crever Avant d'avoir oublié La saveur de la VIE. |
D'après Boris VIAN "je voudrais pas crever".